Zurich, 4. septembre 2025 – Depuis début août, une partie des exportations suisses vers les Etats-Unis est soumise à un droit de douane de 39%. En outre, depuis le début de l’année, le franc s’est apprécié de plus de 10% face au dollar américain. La charge qui pèse sur les entreprises exportatrices aux Etats-Unis est donc élevée et les perspectives sont moroses. Une baisse rapide du droit de douane est incertaine et l’ordre mondial des monnaies « valeurs refuge » vacille. Les incertitudes politiques et l’endettement public élevé ont nettement affaibli le sentiment de sécurité vis-à-vis du billet vert.

« Si la confiance dans le dollar devait continuer Ă  s’éroder, le franc pourrait ĂŞtre encore plus recherchĂ© comme valeur refuge – avec des consĂ©quences majeures pour l’économie suisse », estime Maxime Botteron, Ă©conomiste au sein du Chief Investment Office (CIO) d’Ă۶ąĘÓƵ Global Wealth Management (Ă۶ąĘÓƵ GWM). En effet, l’offre de placements sĂ»rs en francs reste très limitĂ©e par rapport aux obligations d’Etat amĂ©ricaines. Un afflux massif de capitaux pourrait fortement apprĂ©cier le franc, alors que la marge de manĹ“uvre pour de nouvelles baisses de taux est pratiquement Ă©puisĂ©e.

Statut de « valeur refuge » : une médaille à deux revers

Le statut de valeur refuge du franc se traduit par des taux d’intĂ©rĂŞt bas et permet aux mĂ©nages ainsi qu’aux entreprises d’économiser environ 28 milliards de francs par an, selon les calculs des Ă©conomistes d’Ă۶ąĘÓƵ. Par ailleurs, un franc fort rend les importations moins chères et contribue Ă  faire baisser les prix Ă  la consommation. 

Parallèlement, les entreprises exportatrices subissent une pression accrue, car les produits suisses deviennent plus chers à l’étranger. Les avantages liés à la baisse du coût des intrants importés ne compensent qu’en partie ces inconvénients. La marge de manœuvre pour de nouvelles baisses de taux est désormais très limitée et les épargnants doivent accepter des rendements faibles.

La Banque nationale suisse (BNS) fait face à un dilemme de politique monétaire : les taux d’intérêt sont inférieurs d’environ 2 points de pourcentage à ce qu’ils seraient sans l’effet de « valeur refuge », ce qui limite fortement la marge de manœuvre pour de nouvelles baisses de taux. Si la confiance mondiale dans le dollar devait continuer à s’éroder, le franc pourrait encore s’apprécier, ce qui exercerait une pression supplémentaire sur la BNS.

Récession peu probable malgré les droits de douane américains

Les perspectives conjoncturelles dĂ©pendent fortement du niveau final des droits de douane amĂ©ricains pour les exportateurs suisses. MĂŞme si ces droits s’alignaient sur ceux de l’Union europĂ©enne, l’incertitude actuelle pourrait entraĂ®ner une lĂ©gère contraction de l’économie au second semestre. Ce n’est qu’au cours de l’annĂ©e prochaine que la phase de faiblesse devrait ĂŞtre surmontĂ©e. Les Ă©conomistes d’Ă۶ąĘÓƵ prĂ©voient une croissance du PIB de 1,3% en 2025 et de 0,9% en 2026, corrigĂ©e de l’effet des grands Ă©vĂ©nements sportifs.

« Si les droits de douane restent au niveau actuel, la croissance du PIB sur quatre trimestres pourrait ĂŞtre infĂ©rieure d’environ 0,4% », estime Daniel Kalt, Ă©conomiste en chef pour la Suisse chez Ă۶ąĘÓƵ. Une rĂ©introduction de taux d’intĂ©rĂŞt nĂ©gatifs par la BNS en rĂ©action aux droits de douane amĂ©ricains paraĂ®t improbable. Un taux directeur nĂ©gatif rĂ©duirait surtout la pression haussière sur le franc suisse, mais cela ne suffirait probablement pas Ă  compenser l’effet des droits de douane. La BNS devrait donc maintenir son taux directeur inchangĂ© pour le moment.

A moyen terme, le risque d'un déplacement d’une partie de la production pharmaceutique vers les Etats-Unis, en réaction à des droits de douane plus élevés, pourrait peser sensiblement sur la croissance suisse. Si ce transfert s’étalait sur cinq ans, il pourrait retrancher jusqu’à un quart de la croissance prévue sur la période. Même dans ce scénario, une récession profonde resterait peu probable pour l’économie suisse.

Ă۶ąĘÓƵ Switzerland AG

Contacts

Daniel Kalt
Économiste en chef d’Ă۶ąĘÓƵ Suisse
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daniel.kalt@ubs.com

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Économiste, Chief Investment Office d’Ă۶ąĘÓƵ GWM
Tél. +41-44-234 88 71
alessandro.bee@ubs.com

Maxime Botteron
Économiste, Chief Investment Office d’Ă۶ąĘÓƵ GWM
Tél. +41-44-236 87 77
maxime.botteron@ubs.com